Avec ces ultimes moments de l’année 2022, le marché algérien de l’automobile clôture son 6e exercice sans la moindre importation de véhicules neufs par des concessionnaires officiellement installés.
Une décision prise à la fin de 2016 pour ouvrir toute grande la voie à un quarteron d’opérateurs triés sur le volet, et qui allait exercer un véritable monopole sur la pseudo-activité d’assemblage.
Deux années durant, des agréments complaisants ont été attribués à des personnes n’ayant aucun lien avec le secteur, des structures appartenant à des entreprises publiques ont été mises à leur disposition au dinar symbolique, des lignes de crédit sans limite, en dinar et en devise, leur ont été réservées, des facilitations et des exonérations de droits et taxes leur ont été généreusement accordées… Mais en lieu et place de chaînes de montage et de kits devant arriver en amont, complètement désassemblés, on assistera au débarquement de véhicules entiers, dépourvus, le plus souvent, des seules roues en raison des contraintes de stockage dans les conteneurs. Ce qui a été qualifié, du reste, «d’importations déguisées» et «d’industrie de gonflage des pneus».
Déstructuration du secteur automobile
Début 2019, la lame de fond, qui allait redessiner les contours de l’Algérie nouvelle, entraîna dans les abysses ces privilégiés de l’ancien système. Ainsi, le holà a été mis à cette escroquerie à grande échelle qui causera de très lourds préjudices au Trésor public, qui a terni l’image du pays et déstructuré profondément le secteur automobile.S’ensuivit un tarissement progressif et irrémédiable de l’offre de véhicules neufs dans le pays. Des milliers de kits, qui resteront bloqués dans les ports pendant plus de deux années, subiront des détériorations en raison de leur exposition prolongée aux intempéries et à la chaleur. Cette crise de disponibilité sera, en revanche, du pain béni pour les dizaines de revendeurs multimarques et autres barons du marché de l’occasion pour imposer leur diktat. Les prix des voitures, tous millésimes confondus, explosent, atteignant des niveaux historiques et surréalistes.
Pendant ce temps, les tentatives de réorganisation du secteur se succèdent, les promesses d’un dénouement imminent se multiplient, les épisodes d’espoir et de désillusion pour le citoyen s’alternent à rythme régulier, les déclarations des uns et des autres sur les plateaux télé ajouteront plus de confusion à un environnement déjà pollué.
Les premiers signes de dénouement
On devra attendre le second semestre de l’année 2022 pour voir, enfin, se dessiner les contours d’une solution pérenne. Un nouveau cadre réglementaire est mis au point pour asseoir solidement les bases d’une nouvelle relance du secteur. La loi sur l’investissement est promulguée au cours du mois de juillet, suivie des nouveaux cahiers des charges liés aussi bien à l’activité de concessionnaires que celle de l’industrie publiés le 17 novembre.
Ces nouveaux textes viennent, en fait, confirmer l’orientation des pouvoirs publics de miser prioritairement sur la promotion et le développement d’une véritable industrie automobile nationale. L’Algérie ne devrait plus rester un simple débouché pour une kyrielle de marques et de modèles venus des quatre coins de la planète, à la qualité parfois douteuse pour certains.
Le pays a bien été une destination préférée pour des marques nouvelles, inconnues même des professionnels qui faisaient leurs premiers pas dans l’export. Désormais, l’Algérie sera une plateforme de production et d’exportation de véhicules fabriqués localement avec un niveau d’intégration nationale raisonnable et un transfert technologique bénéfique pour l’économie du pays.
Le nom de la 1re marque dévoilé
Aussitôt la procédure de candidature définie et lancée sur la plateforme numérique du ministère de l’Industrie, les dossiers affluent au niveau du Comité technique en charge de l’examen et l’étude des dossiers.
Et c’est le 13 octobre 2022 que les Algériens découvrent finalement le nom de la marque automobile qui jouera les premiers rôles dans le nouveau paysage automobile national, en l’occurrence l’italien Fiat. Les cérémonies de signature de l’accord-cadre et de la convention avec l’Agence algérienne de promotion de l’investissement reflètent, en réalité, la portée stratégique du partenariat entre l’Algérie et l’Italie.
Au-delà de Fiat, c’est un groupe automobile, Stellantis, avec son expertise internationale et sa large palette de marques aussi prestigieuses les unes que les autres, qui confirme son engagement à accompagner l’Algérie dans sa nouvelle stratégie et d’apporter sa contribution au développement d’une filière mécanique nationale.
Un accompagnement qui se déclinera en plusieurs axes, la fabrication, le transfert technologique, la création d’un tissu de sous-traitance locale et aussi une contribution aux programmes de formation professionnelle et universitaire dans les métiers de l’automobile.
Ce partenariat avec l’Italie ne se limitera pas aux seuls véhicules de tourisme, mais s’étendra également aux utilitaires, aux camions et aux cyclomoteurs. On apprendra que la célèbre marque de scooters et de tricycles Vespa sera intégrée au constructeur national de vélo et moto de Guelma.
Signalons enfin, que les Italiens ne seront pas les seuls conquérants dans cette nouvelle industrie automobile nationale. Des négociations seraient actuellement à un stade avancé entre le ministère de l’Industrie et des constructeurs de renommée mondiale de France, d’Allemagne, de Corée du Sud, du Japon et de Chine.
B. Bellil Le Soir d’Algérie