vendredi 22 novembre 2024
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Montage automobile en Algérie : une véritable supercherie

La stratégie de développement d’une filière de production automobile, adoptée en 2014, a été une véritable supercherie.

Le procès lié à l’affaire des indus avantages accordés dans le cadre de “l’industrie” du montage automobile a levé le voile sur l’étendue du désastre économique des voitures produites en Algérie. Un échec sur toute la ligne. Le taux d’intégration, l’importation de kits, le nombre d’emplois créés, les prix des véhicules, le manque à gagner pour le Trésor public, tous les indicateurs démontrent que la stratégie de développement d’une filière de production automobile, adoptée en 2014 par le gouvernement, a été une véritable supercherie. Avec la chute des prix du pétrole, les pouvoirs publics ont misé sur le montage automobile pour réduire la facture des importations de véhicules. Cinq années plus tard, le bilan est catastrophique. La facture d’importation des collections CKD destinées à l’industrie de montage des véhicules de tourisme a atteint près de 3 milliards de dollars en 2018 contre 1,67 milliard de dollars en 2017.

Selon la Banque d’Algérie, les importations de véhicules de tourisme, qui avaient atteint 3,723 milliards de dollars en 2013, ont diminué à 0,807 milliard en 2016 avec les mesures visant à les limiter. En 2017 et 2018, la substitution progressive des importations directes de véhicules par les importations de collections destinées à l’industrie de montage automobile s’est traduite par une hausse de ces importations qui ont atteint 3,616 milliards de dollars, soit le même niveau d’importation directe de véhicules que celui de 2013. Durant les neuf premiers mois de 2019, l’Algérie a importé pour 2,3 milliards de dollars de kits SKD destinés au montage de véhicules de tourisme, de transport de personnels et de marchandises. C’est ce qui a poussé, d’ailleurs certains experts à parler “d’importation déguisée”. Si l’objectif était de faire de la substitution à l’importation, force est de constater que le bilan est négatif. À l’inverse de ce qui était attendu du dispositif SKD/CKD, les importations en termes de valeurs de kits d’assemblage et de montage n’ont cessé d’augmenter d’année en année.

Avantages “scandaleux”
En 2017, déjà, le ministère de l’Industrie, se basant sur une étude, avait estimé que ce régime préférentiel d’avantages fiscaux accordés au moment de l’importation d’un produit démonté et composé de sous-ensembles (SKD) ou d’un produit complètement démonté (CKD), n’a pas atteint “les objectifs prévus”.
Le ministère de l’Industrie avait indiqué que le manque à gagner pour le Trésor public dû à l’importation des collections destinées à l’activité de montage de véhicules (SKD), exonérée de droits de douane en vertu des dispositions de la loi de finances 2010, a atteint 13 milliards de dinars en 2016 et 6,82 milliards de dinars en 2015. Ce chiffre avait atteint de 8,24 milliards de DA pour les cinq premiers mois de l’année 2017. Les pouvoirs publics auraient pu à ce moment-là rectifier le tir. Cela n’a pas été fait. Le procureur de la République, près le Tribunal de Sidi M’hamed (Alger) avait indiqué, en décembre 2019, que le dossier de montage automobile impliquant d’anciens ministres et des hommes d’affaires a révélé des faits “catastrophiques” à l’origine de lourdes pertes pour le Trésor public.

Le représentant du Trésor public avait évoqué des pertes de plus de 128 milliards de dinars. Ces pertes sont reprochées à trois opérateurs poursuivis dans l’affaire. L’actuel ministre de l’Industrie et des Mines, Farhat Aït Ali Braham, avait qualifié, de “scandaleux” les avantages accordés aux opérateurs dans le cadre du montage automobile. Il trouve surprenant qu’une quarantaine de constructeurs mondiaux choisissent l’Algérie pour faire de la fabrication automobile. “En réalité, il s’agit d’une formule pour contourner les barrières douanières”, a-t-il soutenu, indiquant que “le premier cahier des charges n’est pas conçu pour développer l’industrie automobile en Algérie, mais plutôt permettre à 2 ou 3 marques, qui ont été choisies d’une manière discrétionnaire, d’accaparer, par voie de monopole, le marché national, en exonération de tous droits et taxes”.
Chiffres clés

2,3 milliards de dollars
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Ce montant représente la facture d’importation des kits SKD-CKD destinés aux usines de montage automobile durant les neuf premiers mois de 2019.

3,723 milliards de dollars
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Le chiffre correspond à la valeur des importations de véhicules de tourisme durant l’année 2013, ce qui équivaudrait à la valeur des importations des collections SKD-CKD destinées au montage automobile durant l’année 2018.

128 milliards de dinars
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Il s’agit des pertes infligées au Trésor public dues au régime préférentiel d’avantages fiscaux accordés au moment de l’importation d’un produit démonté et composé de sous-ensembles (SKD) ou d’un produit complètement démonté (CKD).

Meziane Rabhi  Liberté